Avec 2.8 millions d’habitants, l’Outre-mer représente une part de 4% de l’électorat, mais avec un taux d’abstention avoisinant les 50% en moyenne sur la dernière décennie. La première question est de savoir comment mobiliser et unifier un corps électoral au-delà des couleurs politiques ?
Dans un contexte de dispersion et de fragmentation du paysage politique, l’Outre-mer pourrait constituer une clé des élections à venir, tout en ayant à l’esprit qu’il sera extrêmement complexe de les mobiliser vers un seul parti.
Au regard des analyses électorales s’appuyant sur les quatre grands axes d’analyse : « l’âge, le sexe, la catégorie-socio-professionnelle et la religion », on ne peut affirmer que l’Outremer se distingue par des segmentations distinctes, tant les électeurs rejoignent les grandes attentes, qui sont dans le dernier baromètre d’Ipsos de Nov.2025 :
* Les difficultés en termes de pouvoir d’achat (hausse de prix, salaire, impôt) 49%
* L’avenir du système social (santé, retraites) 44%
* Le niveau de la délinquance 34%
* Le niveau de l’immigration 30%
* Le niveau de la dette et des déficits 29%
* La protection de l’environnement (climat, biodiversité, pollution) 23%
L’ensemble des dits axes est ressorti avec un sous-jacent commun, qui est, comme sur le territoire métropolitain, l’iniquité fiscale, scolaire, sécuritaire, etc…
Toutes les difficultés rencontrées par les Français s’y expriment avec plus d’intensité pour les habitants d’Outre-mer :
* En matière de pouvoir d’achat, le surcoût de l’approvisionnement aggrave les difficultés.
* Le système social y est moins favorable (accès aux soins), la retraite et les difficultés d’accès à l’emploi limitent la retraite à taux plein, etc.
* La protection de l’environnement est désormais au centre des enjeux avec la multiplication d’événement climatiques extrêmes.
On peut se demander si les citoyens métropolitains, souvent peu familiarisés avec les réalités ultramarines, accepteraient pour eux-mêmes les mêmes contraintes :
* Payer les denrées de base 30% plus cher qu’elles ne le sont ?
* Que seul deux habitants sur trois aient accès à l’eau courante ?
* De n’avoir de l’énergie que certains jours de la semaine ?
La deuxième question politique n’est pas celle du local mais bien du national. Les Outremers sont-ils des territoires délaissés, de délaissement ou constituent-ils une richesse pour la Nation ? Le mémoriel est nécessaire mais pas suffisant.
La question est plutôt celle de l’avenir et de sa préparation. Comment construire une vision à 10 ans des objectifs de l’Outre-mer et des moyens pour y parvenir, en ayant à l’esprit qu’ils seront les premières victimes du dérèglement climatique ?
Poser la question est déjà y répondre en considérant qu’une solution unique est impossible à trouver : un pacte républicain revisité.
Pour l’Outre-mer, la nouvelle articulation du contrat républicain doit être rediscuté. Il faut assurément s’inscrire dans la droite ligne de Victorin Lurel qui souhaitait que le pacte républicain soit revisité avec un socle commun aux Outremers et un socle local de chaque outre-mer.
La sauvegarde du patrimoine productif territorial, dont les ressources halieutiques et agricoles, constituant une prérogative essentiellement dévolue aux échelons locaux, notre contribution propose un plan d’action national de 10 Milliards d’Euros sur 10 ans autour de trois piliers stratégiques indissociables :
* Axe 1 / Besoins de base : La distribution et le retraitement de l’eau et de l’énergie, ainsi que l’accès aux soins (par déploiement de la e-médecine) constitue une priorité incontournable.
* Axe 2 / Sécuriser la vie civile : Encourager la montée en puissance du service national pour assurer la défense territoriale en doublant les effectifs du service national volontaire exclusivement sur l’Outre-Mer et en laissant les appelés sur le territoire.
* Axe 3 / Accompagner le développement économique : Les Outremers dispose de fortes disparités fiscales, ou de niches fiscales. Pour autant, si cela a probablement permis
d’enrayer la crise, cela ne permet pas de faire face aux enjeux.
Les Outremers doivent bénéficier d’une autonomie fiscale, votée par les élus locaux avec l’application de trois règles :
* Les évolutions fiscales devront être conformes à la Constitution française et validées par le Préfet et la Cour des Comptes.
* Les évolutions fiscales feront l’objet d’une évaluation pluriannuelle dont le résultat sera rendu public par l’Etat.
* L’excédent de recettes annuel devra être provisionné pour l’avenir du territoire et ne pas être remonté en Métropole.
Plutôt que des territoires de compensation, faisons des Outremers les pionniers d’un nouveau modèle de développement résilient et le visage d’une République enfin réconciliée avec sa diversité, une et indivisible mais juste et fraternelle, où l’égalité devienne une réalité tangible pour tous les citoyens, de l’Hexagone aux confins de la ZEE ultramarine.
Francisco GUERRIER